Science : une IA capable de transcrire l’activité cérébrale en mots

Une representation du cerveau humain.

 

Une équipe de chercheurs américains a utilisé un réseau d’électrodes et une intelligence artificielle (IA) pour transcrire l’activité cérébrale en mots. Cette étude pourrait un jour aboutir à une prothèse vocale directement connectée au cerveau.

Un entraînement de 40 minutes par participant

Des chercheurs de l’université de Californie, à San Francisco (Etats Unis), ont mis au point une intelligence artificielle capable de transcrire l’activité cérébrale en texte. L’étude, publiée dans Nature Neuroscience, utilise un réseau de 250 électrodes établies dans le cortex périsylvien des patients sous surveillance pour des crises épileptiques. Les chercheurs ont mesuré l’activité cérébrale lorsque les participants ont lu des phrases à haute voix.

Pour entraîner l’IA, l’équipe de scientifiques a fait répéter, aux quatre patients sélectionnés, plusieurs fois des séries de 30 ou 50 phrases, contenant entre 125 et 250 mots différents. Comme « Tina Turner est une chanteuse pop » et « Ces voleurs ont volé 30 bijoux ». Les chercheurs ont suivi leur activité neuronale pendant qu’ils parlaient. Ils ont ensuite eu recours à un réseau de neurones récurrents pour coder l’activité neuronale associée à chaque phrase comme une représentation abstraite. Ce réseau décode la représentation, mot pour mot, pour créer une phrase. L’entraînement n’a pas dépassé 40 minutes par participant.

Jusqu’à seulement 3 % de taux d’erreurs

Au début, le système crachait des phrases absurdes. Parmi ses erreurs : « Ces musiciens s’harmonisent merveilleusement » décodé comme « Les épinards étaient un chanteur célèbre », et « Un rouleau de fil était près du mur » devenu « Will robin portera un lis jaune ». Mais à mesure que le système comparait chaque séquence de mots avec les phrases lues à haute voix, il s’améliorait, apprenant comment la chaîne de nombres était liée aux mots et quels mots avaient tendance à se suivre.

Un total de 15 répétitions a ainsi permis d’atteindre un taux d’erreurs en dessous de 25 %. Pour la moitié d’entre eux, le taux d’erreurs est passé sous la barre des 8 %, une performance équivalente aux transcripteurs professionnels humains. Un patient a même obtenu seulement 3 % de taux d’erreurs.

Il faut prendre en compte les questions éthiques dès maintenant

Il faut toutefois nuancer ces résultats, l’étude utilisant un nombre de mots et de phrases limité. Aussi, cette avancée ne constitue pas une forme de télépathie qui peut sonder les pensées les plus intimes. « Nous n’en sommes pas encore là, mais nous pensons que cela pourrait être la base d’une prothèse vocale », a déclaré le Dr Joseph Makin, co-auteur de la recherche de l’Université de Californie à San Francisco. Le Dr Christian Herff, un expert dans le domaine de l’Université de Maastricht, a déclaré que les gens ne devraient pas s’inquiéter que les autres lisent leurs pensées pour l’instant. Pourquoi ? Parce que la méthode est encore invasive (les électrodes cérébrales doivent être implantées) et la parole imaginée diffère profondément de la voix intérieure.

Ce qui n’empêche pas le Dr Mahnaz Arvaneh, expert en interfaces cerveau-machine à l’Université de Sheffield, de considérer qu’il faut dès maintenant tenir compte des questions éthiques. « Nous [sommes encore] très, très loin du point où les machines peuvent lire dans nos esprits. Mais cela ne signifie pas que nous ne devons pas y penser et nous ne devons pas planifier à ce sujet », a-t-il prévenu.

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