Le portrait d’Elizabeth Lederer, réalisé par l’artiste autrichien emblématique du Symbolisme, s’est hissé au deuxième rang des œuvres les plus chères jamais vendues aux enchères.
Avec des enchères ouvertes à 130 millions de dollars, la séance promettait d’entrer dans l’histoire. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’événement a tenu toutes ses promesses.
Le mardi 18 novembre dernier, au nouveau siège de Sotheby’s, dans le Breuer Building à New York, un portrait d’Elisabeth Lederer est devenu l’œuvre d’art moderne la plus chère jamais adjugée aux enchères dans le monde.
Cette toile monumentale, de plus d’1,80 m de haut, représentant la fille d’un riche mécène juif viennois et signée Gustav Klimt, a finalement trouvé acquéreur pour la somme vertigineuse de 236,4 millions de dollars. Elle se hisse ainsi au deuxième rang des tableaux les plus coûteux vendus aux enchères, juste derrière le « Salvator Mundi » de Léonard de Vinci.
« Prenez votre temps, cela en vaut la peine. Cette œuvre ne reviendra pas sur le marché de sitôt », a lancé à plusieurs reprises le commissaire-priseur Oliver Barker, sous le regard envieux des collectionneurs présents.
L’histoire tragique derrière le chef-d’œuvre
Pas moins de six acheteurs se sont affrontés pour cette toile que le commissaire-priseur a décrite comme « un chef-d’œuvre incontestable de l’âge d’or viennois », marquant « l’apogée de la maturité artistique de Klimt et son lien profond avec ses plus fidèles mécènes ».
Après une vingtaine de minutes d’intense compétition, les dés étaient jetés. Le montant final a largement dépassé l’estimation initiale de la maison, fixée à « plus de 150 millions de dollars ». Une performance qui pulvérise le précédent record pour une œuvre de Klimt, établi à 188 millions en 2023.
Pour mesurer la portée historique de ce portrait, il faut remonter à son passé tourmenté, intimement lié aux heures sombres de l’Europe du XXe siècle. Elisabeth Lederer était la fille d’August et Serena Lederer, éminents mécènes juifs et soutiens essentiels de Gustav Klimt à Vienne.
Sous le régime nazi, cette famille prospère fut la cible des persécutions antisémites. Plusieurs œuvres du maître autrichien qu’ils possédaient furent détruites dans l’incendie d’un château en Autriche.
Une soirée mémorable pour le marché de l’art
Par un heureux hasard, le portrait d’Elisabeth avait été conservé ailleurs et échappa ainsi à la destruction. Après la guerre, il fut restitué à la famille Lederer. L’œuvre passa ensuite entre les mains de collectionneurs prestigieux, dont le marchand d’art Serge Sabarsky, avant d’intégrer la collection du milliardaire Leonard A. Lauder.
Si la toile de Klimt a monopolisé l’attention, une autre pièce singulière a aussi créé la surprise au cours de cette vente historique. Les toilettes en or 18 carats de Maurizio Cattelan, intitulées « America », ont trouvé preneur pour 12,1 millions de dollars.
Cette œuvre entièrement fonctionnelle, pesant 223 livres (environ 101 kilos), se veut une satire mordante de l’excès et de la richesse ostentatoire. Selon Cattelan : « Quoi que vous mangiez, le résultat est le même du point de vue des toilettes. »
