Le juge Benjamin Blanchet a clos, ce mercredi 29 mai, la troisième semaine du très passionnant « Procès Balkany » qui doit se poursuivre jusqu’au 20 juin prochain. Au menu de cette dernière audience, le riad marocain et son financement sur fond de corruption présumée. Les deux parties ont livré des versions diamétralement opposées, à tel point qu’on ne sait plus qui est l’escroc et l’escroqué.
Riad de Marrakech ou comment acquérir une propriété sans laisser de traces
Ce mercredi 29 mai, la dernière audience de la troisième semaine du procès Balkany (du nom de l’un des accusés, maire de Levallois-Perret) a donné lieu à une véritable joute verbale. D’un côté Patrick Balkany, 70 ans et son « acolyte » Jean-Pierre Aubry, l’ancien patron de la société d’économie mixte de Levallois ; de l’autre, l’homme d’affaires Saoudien Mohamed Bin Issa al-Jaber et son avocat Hervé Témime. Il s’agissait, pour les juges, de faire la lumière sur le somptueux riad de Marrakech, acheté en janvier 2010, et son financement. Ce volet est qualifié de plat de résistance dans ce festin judiciaire. À qui appartient cette magnifique résidence ? Qui l’a payé? Selon l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel de Paris, le maître des lieux serait Patrick Balkany. Mais ce dernier ne veut pas adosser cette responsabilité. D’ailleurs aucun document n’atteste de cette acquisition, ni ceux de la société civile immobilière (SCI) propriétaire de la demeure, ni ceux de la société panaméenne détentrice de 99 % du capital de la SCI.
Pourtant, ce sont les Balkany (Isabelle et Patrick) qui ont choisi cette villa et les commandes de meubles et de linge de maison et autres portent leurs noms. De plus, le riad a été baptisé Dar Gyucy, une contraction des prénoms de Gyula et Lucie, leurs petits-enfants. Toutes ces coïncidences signifient forcément quelque chose.
Selon la version officielle, les Balkany n’auraient pas payé un sou dans l’acquisition de cette villa. Cette dernière serait un cadeau du Cheikh Saoudien Mohamed Bin Issa al-Jaber et du richissime industriel belge George Forrest, à hauteur de 2,75 millions d’euros, en contrepartie de plusieurs concessions et marchés juteux à Levallois et en Namibie pour l’un et l’autre.
Les deux parties s’empoignent
Appelé à la barre Jean-Pierre Aubry, homme-lige de Patrick Balkany, répond à tout, sauf aux questions du président du tribunal : « Ce n’est ni ma maison, ni mon argent », argumente-t-il. Il prétend avoir rencontré l’homme d’affaires saoudien, « un ami », « cinquante à soixante fois en deux ans ». « Des mensonges à 100 % », répond Mohamed Bin Issa al-Jaber qui jure avoir vu Aubry « trois ou quatre fois, jamais plus de 45 minutes à une heure ». Aubry dit avoir seulement fait les démarches pour le Saoudien, qui aurait utilisé Balkany comme un prête-nom pour son riad. Une accusation à laquelle le saoudien répond en indiquant qu’il a une centaine de sociétés et de domaines à travers le monde qui porte son nom. Donc qu’il n’est pas du genre à dissimuler des propriétés.
« Il y a un menteur parmi vous deux ! »
Autorisé à intervenir à son tour, Patrick Balkany accable Mohamed Bin Issa al-Jaber. Ce dernier serait « couvert de procès » et ne paierait jamais ses dettes. « C’est un escroc », hurle le maire de Levallois. Me Hervé Témime, l’avocat du cheikh, bondit alors et lui demande : «Et vous, vous êtes quoi ? Vous n’êtes pas un escroc ? ». Après ce flot d’accusations et de témoignages contradictoires, Benjamin Blanchet, le président de l’audience, a clos la séance par une déclaration lumineuse : « Il y a un menteur parmi vous deux ! ». Assurément !